L'inquiétude sursaute au frisson d'une feuille | Anthony & Orianne

Anthony savait bien qu’il prenait un risque à chaque fois qu’il décidait de retrouver les rebelles, mais en même temps ce n’était pas comme s’il pouvait réellement se permettre de ne pas venir. Il ne pouvait pas venir autant qu’il le voudrait, surtout dernièrement parce que le vieil homme se devait quand même de se montrer le plus prudent possible. Il ne savait que trop bien qu’on le surveillait, que tout le monde n’avait pas confiance en lui malheureusement, même si Edgar semblait encore avoir confiance en lui (ce qui était la meilleure des choses bien évidemment). Mais quand même, Anthony ne pouvait pas abandonner les rebelles, il devait faire en sorte d’être le plus présent possible. Surtout après la disparition de Daphnée. Anthony ne savait toujours pas où elle se trouvait, si elle allait bien, pourquoi elle avait disparu. Forcément, le vieil homme ne pouvait pas s’empêcher de se sentir inquiet.

Il tenait donc à être présent pour le groupe, pour les aider autant que possible. Surtout que Nathaniel semblait faire encore à sa tête. D’après ce qu’il avait compris, son ancien ami n’était pas revenue dans le groupe depuis quelques jours. En soit, ce n’était pas bien étonnant, ni choquant. Ça arrivait souvent à Nathaniel de disparaître plusieurs jours, mais en même temps Anthony trouvait ça quand même étonnant qu’il le fasse en cet instant précis. Ce n’était pas le moment, il se demandait bien ce qu’il pouvait être en train de faire. Enfin, il se disait qu’il s’était peut-être rendu dans le royaume du bout de l’océan. Anthony ne savait vraiment pas comment son ancien ami parvenait à se rendre aussi souvent dans cet endroit, au vu de la manière dont les choses s’étaient passées. Bon, forcément, Anthony et lui n’avaient pas forcément la même manière de voir les choses non plus.

Anthony se trouvait là, donc, auprès des rebelles, prenant la peine de se reposer un peu avant de retourner dans l’enceinte du château auprès du roi. Ce fut à ce moment-là qu’il fut dérangé par Orianne. Anthony manqua presque de sursauter, alors que la « jeune femme » (?) prenait la parole.

« Si on veut. » Répondit-il, peut-être un peu trop grognon par rapport à la manière dont il parlerait à Daphnée, ou Eleonore, ou même Nathaniel (quand bien même, il n’était pas toujours très à l’aise en compagnie de son vieil ami). Ce n’était pas contre elle, en soit Anthony n’avait rien contre le fantôme, mais en même temps, il n’était pas certain que ça soit une bonne chose qu’elle soit avec les rebelles, qu’elle ait décidé de les suivre. Il était mal à l’aise en sa compagnie en tout cas, c’était surtout ce qu’il fallait retenir. « Je me fais un peu de souci. » Avoua-t-il, même s’il n’avait pas forcément besoin de le faire.

Anthony ne pouvait pas spécialement cacher le fait qu'il se faisait du souci, ça devait se lire sur son visage. Alors il n'avait aucune raison de cacher le fait qu'il était inquiet, même s'il ne savait pas réellement s'il avait envie de parler de tout cela avec le fantôme. Ce n'était pas contre elle, mais l'homme n'était pas spécialement à l'aise en compagnie de la créature. Elle ne méritait pas que ça soit le cas, mais c'était quand même un peu étrange de se retrouver en compagnie d'une personne qui était morte. Et pas forcément une personne qu'on avait envie de voir, ou du moins pas une personne qu'on avait perdu et pour qui on donnerait tout afin de pouvoir parler un peu.

L'homme n'avait pas spécialement envie de se confier donc, mais en même temps le fantôme le questionna et il ne pouvait pas simplement ignorer la jeune femme. C'était lui qui avait commencé par dire qu'il était soucieux, c'était sans doute normal que Orianne se pose des questions et lui pose des questions. Enfin en l'occurrence, une question. En réalité, l'homme se disait quand même que c'était un peu évident et que Orianne pourrait deviner elle même ce qui le poussait à se faire du soucis. Parce que la situation actuelle n'avait rien de plaisante. Que ça soit parce que les rebelles étaient recherchés par les forces du roi ou parce que Daphnée avait disparu sans qu'ils ne sachent où elle se trouvait à présent.

« Je me fais du souci pour eux. » Répondit-il donc, au fantôme. Par eux, il parlait évidemment des rebelles pour qui il se faisait énormément de soucis. Ce n'était pas pour rien que l'homme venait souvent les trouver en prenant donc de gros risques. Il tenait à les aider du mieux possible, du mieux qu'il pouvait en tout cas. « Je me pose beaucoup de questions sur la disparition de Daphnée. » Ajouta-t-il alors, ne sachant pas réellement pourquoi il prenait autant la peine de se confier à Orianne.

Le serviteur du roi n'avait pas forcément besoin de le faire, mais en même temps il n'allait pas non plus ne pas répondre au fantôme si elle lui posait si directement une question. Et au fond, sans doute que Anthony avait plus besoin de se confier qu'il n'osait le croire. Il n' avait en même temps pas réellement la possibilité de se confier à qui que ce soit. Même Nathaniel qui l'écoutait parfois n'était pas forcément le mieux placé pour l'entendre. Est-ce que Orianne l'était ? Disons qu'il y avait quand même bien pire comme choix. Même s'il n'avait quand même pas l'intention de lui dire beaucoup plus de chose.

Anthony aimerait bien se montrer si optimiste que le fantôme. L’homme ne savait pas exactement comment Orianne faisait pour être à ce point optimiste, mais en même temps ce n’était pas une nouveauté qu’il avait clairement du mal à la comprendre par moment. Ce n’était pas pour rien qu’il était quelque peu mal à l’aise quand il se trouvait en sa compagnie. Le serviteur du roi avait énormément de mal à la comprendre, à la cerner et à se mettre à sa place. En tout cas, la jeune femme – si on pouvait réellement la qualifier de la sorte, puisqu’elle ne risquait pas de vieillir donc – semblait croire que Daphnée se portait bien et qu’elle avait pu rebondir. Anthony avait quand même beaucoup de mal à juste se dire qu’elle allait bien. Forcément, c’était ce qu’il espérait. Il espérait que la jeune fille avait décidé de s’en aller de son propre chef, comme elle avait déjà dit à Eleonore qu’elle voulait partir, il espérait qu’elle avait trouvé un endroit où se cacher, qu’elle avait trouvé un refuge et qu’elle s’en sortait donc. C’était vraiment quelque chose qu’il espérait, mais en même temps il ne parvenait pas à juste se dire que ça allait être le cas.

Anthony pouvait très bien se dire simplement qu’il fallait voir comment les choses allaient se passer dans l’avenir, sans se prendre le chou, sans trop s’inquiéter. Sauf que ce n’était clairement pas le genre de l’homme, il n’était pas capable de le faire. Il se faisait toujours beaucoup de souci, il avait tendance même à être plus pessimiste qu’autre chose. Ce qui en voulait pas dire qu’il avait toujours agis non plus, clairement on ne pouvait pas réellement dire qu’il avait toujours agis.

« Je te trouve particulièrement optimiste. » Affirma-t-il, en ne pouvant pas réellement cacher ce qu’il ressentait présentement en entendant les paroles de la jeune femme (encore une fois si on pouvait se permettre de parler de la sorte d’une fantôme et donc d’un être qui était… mort). « Je ne sais pas comment tu fais. »

Et de son côté, sans doute que Anthony se montrait trop sombre. Mais en même temps, il avait vu énormément de chose dérailler, il avait vu des proches mourir, des personnes qu’il aimait du plus profond de son cœur. C’était difficile pour lui d’avoir entièrement foi en l’avenir, en connaissant tous ce qui était capable d’arriver dans une telle situation, avec une telle configuration.

Effectivement, Anthony était mort d’inquiétude pour Daphné et il ne pouvait pas s’empêcher de l’être. L’homme ne pouvait pas faire comme s’il ne se faisait pas de souci, alors que la jeune fille avait disparue. Ils n’avaient pas de nouvelle d’elle, elle pouvait très bien être morte ou pire être entre les mains de Edgar. Anthony se rassurait en se disant que si jamais le roi avait attrapé une des rebelles, il ne se serait pas retenu de le lui dire. Mais rien ne pouvait leur garantir que la jeune fille avait eu ce qu’elle voulait, même si elle était malheureuse ici parmi les rebelles et plus précisément en compagnie de Nathaniel.

Orianne lui affirma qu’elle demeurait quand même un peu inquiète, mais qu’elle ne se faisait seulement pas un sang d’encre. Franchement, l’homme ne comprenait pas que ça soit possible, mais c’était sans doute parce que la jeune femme était morte, et lui non. Ils ne se comprenaient jamais, c’était une évidence. Depuis que Anthony l’avait rencontré, il n’avait jamais pu la comprendre, ce n’était pas aujourd’hui que les choses allaient changer. Anthony voulait bien reconnaître que la jeune fille n’éait pas bien ici, mais ça n’enlèverait pas le fait qu’il ne pouvait pas s’empêcher de s’inquiéter. Mais évidemment, il était en vie comme Orianne ne manqua pas de lui rappeler.

« Et elle, elle est peut-être morte. »

Il n’avait pas envie de voir tout en négatif, mais en même temps il ne pouvait pas complètement ignorer ce qui arrivait quand même. Daphnée était peut-être morte et si c’était le cas, le serviteur du roi aurait le sentiment de ne pas avoir bien joué son rôle, qu’il n’aurait pas suffisamment bien protégé Daphnée tout simplement. Alors, forcément, Orianne avait raison sur le fait qu’il valait sans doute mieux penser qu’elle avait simplement réussi à obtenir quelque chose qu’elle désirait, qu’elle se sentait bien où elle se trouvait. C’était bien mieux pour l’âme, sauf qu’en même temps si ce n’était pas le cas, Anthony n’avait aucune envie de se dire qu’elle allait bien, si à côté, elle était morte. Il ne pouvait évidemment pas prendre le risque de se réjouir de quelque chose, si Daphnée n’était plus rien au final. Non, il en était incapable, tant pis s’il devait passer pour l’éternel rabat-joie, il ne pouvait pas faire ça. Et donc il s’inquièterait toujours pour Daphnée et ne manquerait pas de la chercher quand cela lui sera possible, même s’il ne risquait pas de la trouver.

Visiblement, les paroles de Anthony ne firent pas du tout plaisir au fantôme qui ne manqua de lui demander comment il pouvait envisager l’option que Daphnée soit morte. Comment ? Eh bien, il ne savait pas… peut-être parce que ce monde était dangereux et qu’il en avait vu beaucoup mourir justement. Orianne lui affirma qu’il devrait lui faire plus confiance que cela, que Daphnée était plus forte que ce qu’il pouvait penser. Anthony n’avait jamais considéré Daphnée comme faible, bien au contraire, au vu de tout ce qu’elle avait vécu, l’homme trouvait qu’elle avait quand même une sacrée force de la nature. Ce n’était pas un manque de confiance qu’il avait vis-à-vis de Daphnée, mais seulement… de l’inquiétude. Parce qu’il adorait cette jeune fille, et qu’il ne supportait pas l’idée qu’elle puisse également être morte comme tous les autres qu’il avait perdu.

En tout cas, la réaction de Orianne ne manqua pas d’être assez virulente. Pour le coup, l’homme appréciait assez en effet qu’elle soit un fantôme et qu’elle n’ait pas la possibilité physique de lui mettre une gifle. Surtout que Anthony ne considérait quand même pas méritait à ce point une gifle.

« Peut-être que si j’envisage une telle option, ce n’est pas parce que je ne lui fais pas confiance, mais que j’ai parfaitement conscience de comment est ce monde. » Répondit-il alors. Cela ne servait peut-être à rien qu’ils rentrent dans ce débat, mais en même temps Anthony ne pouvait pas complètement cacher son inquiétude et se contenter de hocher de la tête aux paroles de son interlocuteur. Quand bien même, ce serait surement plus facile de le faire. « Je sais bien qu’elle est forte et qu’elle peut très bien s’en sortir, mais j’ai aussi parfaitement conscience de comment est ce monde et des dangers qu’il représente. »

Il n’avait aucune envie que Daphnée soit morte, il avait envie de considérer qu’elle était forcément vivante et qu’elle s’en était sorti à merveille. Sauf que Anthony n’était pas naïf, il savait que ce monde était dangereux, il avait sans doute vu les pires horreurs qu’il était capable d’y avoir dans ce monde. Il avait vu ce que les pires personnages étaient capables de faire et ça n’avait rien de beau. Autant dire qu’après cela, il était quand même difficile de juste avoir confiance en la bonne étoile.