Un nom ? Pourquoi faire ? - Liam

Liam est né un jour sombre d'automne. Le ciel était bas, lourd, noir. Et le début de vie de Liam ne devait pas être mieux. Sa mère est décédée en le mettant au monde, le laissant ainsi orphelin, son père ne pouvant être considéré comme un vrai père. Riche, bourgeois et beaucoup trop occupé pour s'encombrer d'un marmot, aussi mignon soit-il. Liam aimait son père de tout son cœur, mais ce n'était, visiblement, pas réciproque. Triste n'est ce pas ? Attendez un peu de connaître la suite.

Afin de se décharger de Liam, son père payait un précepteur et une nourrice qui s'occupaient de lui comme si il était leur propre fils. Au point que, alors que Liam atteignait ses quatre ans, ces deux-là faisaient plus figures de parents que de simples employés au service de son père. Le petit garçon, malgré l'absence toujours pesante de celui avec qui il partageait cinquante pourcent de ses gènes, était heureux. Il apprenait le violoncelle en compagnie de Marie, la douce jeune femme qui avait été prise au hasard pour devenir sa nourrice tandis que son mari lui enseignait la langue, les manières de haute-société, les mathématiques, la géographie et quelques autres petites choses. Liam ne croisait que rarement son père (d'ailleurs, si aujourd'hui il n'a aucun problème pour se souvenir du visage doux de Marie et celui, plus rieur, de Théodore, il a toutes les peines du monde à se souvenir des traits de son père, même lorsqu'il se regarde dans un miroir et tente de retrouver celui-ci), il dinait en compagnie de Marie, Théodore et du vieil homme qui avait la cuisine pour domaine. Cependant, ce bonheur, au final très précaire, se rompit définitivement alors que Liam avait sept ans.

Après de longues années, la mère de Marie avait fini par rendre son dernier souffle dans la maison où elle avait toujours vécue. Ainsi, la nourrice et le précepteur de Liam étaient partis pour un village bien loin de Piquiel, au fin fond de l'île. Là-bas, on voyait tout de suite que l'on était très loin de la résidence de la famille royale. C'était un petit village discret, mais qui ne tenait quasiment plus debout. Par ailleurs, la maison de la vielle dame elle-même tombait en ruines. Le jeune couple ne devait passer qu'une semaine là-bas avant de rentrer à la demeure du père de Liam. La sixième nuit fut celle de trop. Alors que Théodore et Marie était tranquillement endormis dans l'ancienne chambre de la jeune femme, la maison s'était écroulée sur elle-même suite aux ravages d'une tempête, scellant ainsi le tombeau de deux jeunes gens morts trop tôt, trop vite. Et laissant un petit garçon orphelin dans son cœur. Une nouvelle fois.

Je crois qu'il n'est pas utile de vous décrire le désespoir qu'a ressenti Liam en apprenant la mort de ses parents par procuration. Un désespoir tel qui lui colla des envies de mort et de chaos. Dans son cœur d'enfant, il désirait que le reste du monde souffre autant que lui souffrait. Il pleura. Longtemps. Il cassa tout ce qui passait à portée de ses doigts, le désespoir bousillant son cœur, les larmes brûlants ses yeux, ses cris silencieux résonant dans l'écho de sa chambre, lui renvoyant sa solitude encore et toujours. Quelques jours plus tard alors que Liam était seul dans le manoir de son père, des gardes royaux débarquèrent et l’emmenèrent. Le petit garçon qu'il était n'osa se débattre, terrifié et ne comprenant pas vraiment ce qui se passait. Épuisé aussi, après des nuits passées à pleurer et avoir espérer pouvoir rejoindre Marie et Théodore.

Ballotté sur barque cahotante, le petit garçon transi de froid tremblait, autant à cause de la brise qui s'infiltrait partout avec l'objectif de geler ses membres, que de la peur. La peur qui étreignait son cœur comme un étau, désirant lui broyer les os et prendre possession de son être. Malgré ce que Théodore avait toujours dit du petit garçon, Liam n'était pas spécialement courageux, encore moins dans une situation pareille. Après tout, il n'avait que sept ans. Et je continue à affirmer que sept ans, c'est bien trop jeune pour mettre un petit garçon en prison, surtout lorsqu'il avait vécu autant de déception et d'horreur. Et ça devenait totalement impensable lorsque l'enfant en question n'avait commit aucun autre crime qu'être profondément malheureux face à la mort de ceux qu'ils aimaient. Mais revenons-en à Liam. Celui-ci voyait se dessiner au loin l'île des soupirs et la prison qui contenait sa propre cellule dans laquelle il serait confiné pour les onze ans à venir. Mais ça, Liam ne le savait pas.

Et les années passèrent. Liam ne s'habituait pas à la vie en prison mais il la supportait de mieux en mieux. Elle était devenu son quotidien et il s'était résigné à ne connaître que ça pour le restant de sa vie. Mais lorsqu'il dépassa les quinze ans, il avait clairement eu une rechute. Lui qui avait fini par parler, babiller au moins un peu histoire de ne pas oublier sa langue natale, celle que Théodore et Marie lui avait apprise, il s'était muré dans un profond silence. Et seuls les plus anciens pensionnaires de la prison avaient comprit. Car c'était devenu officiel. Liam avait désormais passé plus d'années en prison qu'en liberté. Son silence dura longtemps. Un an pour être exacte. Et une année sans parler, c'est long, terriblement long. Mais c'est le temps qu'il avait fallu pour que la dernière flamme d'espoir s'éteigne dans le cœur de Liam. Au final, c'était le brun qui avait détruit cette flamme, il l'avait tué pour arrêter de ressentir, arrêter de souffrir. C'est à ce moment-là que le jeune homme décida d'enfermer ses sentiments au fin fond de son esprit.

Et pourtant, deux ans plus tard, il arriva ce que Liam n'attendait plus. La libération. Pourtant il l'avait senti venir. Il avait su dès que Eleonore avait mit le pied dans la prison que la jeune femme changerait les choses. Et il avait eu raison. Quelques mois, l'alliance de Nathaniel et Eleonore les menaient à la liberté. Certains étaient partis refaire leurs vies. Liam les avaient considérés comme des lâches. Car durant ces onze années passées en prison, le jeune homme avait eu tout le temps de réfléchir, penser, songer. Même avec la disparition de son professeur, il avait continuer à exercer son esprit. Et pour lui, Féérie était dans une impasse. Une impasse dont ils ne pourraient sortir qu'en faisant machine arrière. Seulement Edgar, le roi, (le roi des cons selon Liam. Oui le jeune homme ne supportait pas le roi. Et oui, son emprisonnement n'y était sans doute pas pour rien.), ne reviendrait jamais sur ses décisions passées d'après le brun. Et pour lui, le salut de Féérie se trouvait dans le rétablissement de la vérité. Oui la douleur, la mort et l'horreur existaient. Oui les vivre n'était jamais agréable. Mais ce n'était certainement pas en se voilant la face que les choses allaient s'arranger, bien au contraire. Alors il avait suivit la rebéllion sans hésiter. Et il s'était dit que le jour où celle-ci ne lui conviendrait plus... Et bien il ne serait jamais trop tard pour faire cavalier seul. Après tout, la solitude restait sa plus fidèle amie, non ?